Carac'Terre : interview de Noélie, fondatrice de l'Intendance

Nous commençons notre série d'interviews Carac'Terre, les interviews des personnes qui font du bien à la planète, avec Noélie, fondatrice de l'Intendance. Nous revenons avec elle sur son parcours, sa vision de l'écologie et de l'alimentation et sur ce qui l'a poussé à créer son propre site de livraison en vrac à vélo ou scooter électrique. Une femme engagée, qui croit au Made in France et au local et... qui nous donne le mojo !

Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Noélie, j’ai 28 ans, j’habite à Paris, et je suis entrepreneure depuis 2019. J’ai créé un site de livraison en vrac qui s’appelle L'Intendance pour faciliter la transition vers un mode de consommation plus durable.

Peux-tu nous parler de ton enfance ?

J’ai grandi à Aix en Provence, dans une famille nombreuse de 5 enfants, originaire de Belgique et d’Allemagne. J’ai eu une enfance incroyable, au sein d’une famille ouverte. Nous avons eu la chance de beaucoup voyager avec mes parents, ils nous emmenaient dès tout petits : à 3 ans nous avons fait un tour du monde. Ils ne voulaient jamais retourner au même endroit. Je viens aussi d’une famille d'entrepreneurs dans l'alimentaire et la grande distribution. Mes grands-parents ont ouvert l’un des premiers Intermarchés dans les années 60. C’est ce qui a alimenté mon envie d’entreprendre et de changer un modèle qui a trouvé ses limites du point de vue environnemental.

Quel est ton parcours ?

J’ai fait une prépa à Douai puis une école de commerce à Grenoble. J’ai ensuite travaillé pendant deux ans à New-York dans les Cleantech (énergies renouvelables) avant de me lancer dans l’entrepreneuriat.

Si c’était à refaire, est-ce que tu te lancerais dans les mêmes études ou ferais-tu les choses différemment ?

Je ferais pareil, parce que c'est ce qui m'a permis de me construire et d'en arriver là. J’ai le seul regret de ne pas avoir appris à coder, j’aurais aimé rajouter une brique plus Tech à mes études. Je ne suis pas une grande fan du système des écoles de commerce qui est assez creux mais mes deux années de prépa ont été très formatrices.

Raconte-nous ce que tu fais au quotidien ? Pourquoi as-tu-choisi cette voie ?

J’ai toujours été fascinée par la capacité des personnes à créer et développer de nouveaux concepts. Je pense que notre génération est la mieux placée pour changer les choses, créer des projets soutenables alignés avec les enjeux actuels. J’ai toujours su que je voulais créer une entreprise durable et y mettre toute mon énergie.

En tant que consommatrice, je me suis rendue compte qu’il y avait très peu d’alternatives responsables notamment sur le plastique. J’ai eu un déclic en voulant faire le July Plastic Free Challenge et me suis rendue compte que de ne pas utiliser de plastique pendant un mois, c'était impossible à faire pour moi. Ça a été un tournant et je me suis dit qu’il y avait une réelle nécessité d’innovation dans le secteur. J’ai donc décidé de lancer en 2019 L’Intendance, un site de produits alimentaires, cosmétiques et d’entretien en vrac et livrés à vélo ou en scooter électrique avec un système de consigne.

Est-ce que c’était difficile de mettre en place un système de livraison plus durable ?

Ce n’était pas évident, c’est très cher de favoriser l'électrique donc on a dû négocier et trouver des terrains d’entente. Il fallait aussi rajouter la problématique des consignes qui implique une logistique retour à prendre en compte. Tous les partenaires ne sont pas prêts à le gérer : on a vraiment dû convaincre nos partenaires que le réemploi allait de plus en plus se démocratiser. Nos prestataires actuels comprennent l'enjeu et veulent contribuer à l’essor de cette innovation
d’usage.

On aime bien la thématique de l'alimentation chez Tomojo : Quelle était ton alimentation pendant ton enfance ? Et celle de maintenant ?

Nous avons toujours bien mangé, ma mère cuisinait de façon équilibrée et avec des produits frais. Cela m’a sensibilisée aux apports et à la qualité des produits que l’on mangeait. Maintenant je suis beaucoup plus attirée par une alimentation végétarienne, j’aime bien manger de façon saine par goût. Pendant mon enfance, nous partagions souvent des plats de viande en sauce que j’ai aujourd’hui quasi totalement remplacés par des sources de protéines végétales. Je dirais que la viande représente environ 5% de mon alimentation.

Quels sont tes gestes quotidiens envers la planète pour réduire ton empreinte dans ta vie quotidienne ?

Les réductions de mes déchets avec le sans emballage, le transport : je ne me déplace qu'à vélo et je me suis fixée comme objectif de ne prendre l’avion qu’une fois par an voire 0 fois si je peux m'en passer. Depuis récemment, j’essaye également de modifier mes habitudes alimentaires et d’adopter une alimentation plus locale et de saison. J’apprends beaucoup et c’est très gratifiant !

Quelles sont tes passions/hobbys/engagements autres ? Le confinement en a-t-il révélé des plus récentes ?

J’ai beaucoup de passions : j’aime cuisiner, dessiner, danser, tester de nouvelles recettes cosmétiques et me sentir utile. Pendant le confinement je n’arrivais pas à rester dans mon coin alors qu’il y avait des situations graves à côté de chez moi, donc j'ai fait le plein de courses à des personnes âgées. C’était un mini geste mais j’étais heureuse de pouvoir aider à mon échelle.

Qu'est-ce que tu aimerais faire dans 5 ans ? Tu te vois où ?

Je rêve d'avoir réussi à faire grandir L'Intendance et que ce soit devenu une référence de la consommation alimentaire durable en Europe. Je pense que l’on peut se déployer en Europe en ayant une démarche toujours soutenable si c’est fait de façon locale. Je trouve ça dommage de se limiter à l’Ile de France car justement notre mission et de rendre le vrac accessible à tous, pas juste à ceux qui ont la chance d’avoir un magasin de vrac en bas de chez eux.

Je suis passionnée par la mutation de la logistique, et je pense qu’il faut qu'elle soit plus localisée, plus digitalisé, avec moins d’intermédiaires et moins d'emballage. Il faut arriver à passer par un maillage plus local, avec un conditionnement sur mesure et réalisé plus tard dans la chaine d’approvisionnement.

Comment vois-tu les choses en termes de climat et de transition énergétique ?

Je crois vraiment en l'innovation, aux nouvelles technologies qui vont nous faire avancer par exemple avec la percée dans l'hydrogène. En Chine, la part de l'électrique est énorme, et j’espère sincèrement que cette transition sera également amorcée rapidement en France. Je pense qu’il va aussi y avoir des innovations d'usage. La crise sanitaire a mis en lumière le fait qu'on ne peut plus dépendre de régions du monde aussi éloignées. Je crois au Made in France et au local. Donc oui, je suis plutôt positive quant au futur !

Comment vois-tu l'évolution de la façon dont les humains se nourrissent ? et nos animaux ?

Pour moi il y a deux sujets : la qualité de ce que l’on mange et son empreinte. Le fait de manger de la viande de bonne qualité et qui a été élevée localement ne me dérange pas. Mais quand il s’agit de viande ultra transformée qui vient de je ne sais où, c’est beaucoup plus problématique. L’élevage intensif est une catastrophe, il faudrait cultiver moins de soja pour nourrir le bétail et cultiver des protéines plus durables. Il faut que l’on acquière des connaissances à ce niveau et qu’on soit mieux informés : on n’est pas assez instruits sur les apports nutritionnels nécessaires, les vertus de chaque produit, ce que représente 200g, on est devenus très déconnectés de notre alimentation.

Pour nous, le Mojo c’est quelque chose qui redonne la pêche et l’énergie, quel est donc ton Mojo ?

Je dirais que mon moteur principal c’est de voir que les choses changent, que l’écosystème économique foisonne d'alternatives et d'initiatives durables. De plus en plus de monde souhaite travailler dans un domaine qui a du sens, c’est très positif pour l’avenir.

Ton produit préféré en vente sur l'Intendance ?

Difficile…avec l'arrivé du Club-Maté qui est un acteur historique de la consigne, je le mettrais à égalité avec le shampooing solide à la fleur d'oranger dont je ne peux plus me passer.

Si tu devais donner un conseil pour nos lecteurs pour aider la planète dans la vie de tous les jours quel serait-il ?

Il faut se questionner sur ses façons de faire, de consommer. Nous sommes inondés d'articles alarmistes mais tant que quelqu’un n’a pas de déclic personnel, ce changement ne se fera pas forcément dans la durée et avec joie. C’est un processus personnel du quotidien de se demander s’il y a une meilleure alternative qui existe ou si l’on fait quelque chose par simple habitude ou routine. C’est toujours fructueux de remettre les choses en question pour avancer et s’aligner au mieux avec ses valeurs.

Tu es plutôt...

Cat Stevens ou Michel Berger ? Très difficile, ça dépend de mon humeur, mais je dirai Cat Stevens.

Tintin et Milou ou Obélix et Idefix ? Obélix et Idéfix !

Team chien ou team chat ? Chat !